C’est la dernière étape de notre série sur les ornithologues ! Découvrons cette semaine une autre de leurs missions qui est, comme le baguage, une spécialité à part entière : le suivi de la migration.
En quoi consiste le suivi de la migration des oiseaux ?
Comme nous l’avons vu dans la série d’articles sur la migration, notre pays est situé sur l’une des « autoroutes » migratoires pour les oiseaux en Europe. La diversité des habitats composant l’Hexagone est un facteur essentiel pour l’accueil d’espèces très différentes en matière d’exigences écologiques. Très tôt, des curieux d’oiseaux ont souhaité compléter leurs connaissances ornithologiques en s’intéressant au mystère de la migration des oiseaux. Ils ont ainsi commencé à réaliser des suivis migratoires sur le terrain.
Les premiers suivis remontent aux années cinquante : il s’agissait avant tout d’actes précurseurs de quelques passionnés isolés. Puis, d’autres sites d’observations de la migration ont vus le jour, en réaction aux abus de la chasse. Ainsi, le suivi sur le col désormais bien connu d’Organbidexka s’est mis en place en réaction aux tirs incessants sur les oiseaux migrateurs, en particulier sur les pigeons ramiers. De même, le suivi réalisé à la pointe de Grave fut une réponse au braconnage des tourterelles des bois pratiqué dans le Médoc.
Aujourd’hui, un réseau d’associations naturalistes, opérationnel depuis 2008, coordonne le suivi de la migration (pré et postnuptiale) sur différents sites en France. Un site internet et une base de données permettent de sensibiliser le grand public et de rassembler un maximum de données sur le long terme.
Les différents sites de suivi migratoire en France de la Mission Migration
Pourquoi suivre la migration ?
Lorsque quelques passionnés ont commencé à s’intéresser de près aux oiseaux et à la migration, il n’avait comme outil que l’observation directe. Le développement de techniques de suivi telles le baguage, la pose de balises ou encore le radar n’enlève rien à la pertinence du suivi sur sites. Les données accumulées depuis des dizaines d’années, suivant un même protocole, sont scientifiquement exploitables. Ainsi, le suivi de la migration au col pyrénéen d’Organbidexka a permis de mesurer l’effondrement européen des effectifs du Milan royal. Ces conclusions ont permis la mise en œuvre d’un plan national de restauration de ce rapace (clic-clic sur l’image pour en savoir plus).
Même si la migration est un phénomène de mieux en mieux connu, beaucoup de questions restent sans réponse. Seul un travail de terrain par des personnes qualifiées pourra permettre d’apporter des éléments de réponse. A l’heure où les scientifiques s’interrogent sur les conséquences du changement climatique sur le calendrier migratoire des espèces, le travail d’observation directe des ornithologues, par la quantité de données qu’il apporte, est indispensable.
Comment suivre les oiseaux en migration ?
C’est à la fois une mission a priori simple (compter des oiseaux) mais qui requiert des compétences et des connaissances pointues ! Les ornithologues qui comptent les oiseaux en migration sont, à l’instar des bagueurs, une sorte de branche à part tant cette discipline est exigeante. On les appelle, en langage ornitho, des « spotteurs ». Un site de suivi de migration des oiseaux est en effet désigné comme un « spot ».
Le spotteur doit compter selon un protocole tous les oiseaux qu’il voit passer en migration sur son spot. Cela va des rapaces aux passereaux en passant par les oiseaux marins ! La situation géographique du spot va déterminer les espèces qui y passeront. Ainsi, les cigognes ne craindront pas de passer par les cols pyrénéens alors que les oiseaux marins resteront au large ou suivront les côtes.
Le spotteur est présent sur son spot du lever au coucher du soleil et ce parfois sous des conditions météorologiques pénibles. Ses connaissances ornithologiques doivent être pointues car, selon les protocoles, il doit âger et sexer un oiseau qu’il observe. C’est le cas pour certaines espèces de rapaces. Il doit souvent gérer des passages très important d’oiseaux. Pour les spots de migration de passereaux, il faut compter les oiseaux tout en les identifiant, notamment grâce à leurs cris.
Suivre la migration : une histoire de spécialistes ?
Si vous souhaitez découvrir ce qu’est un spot de migration, surtout : allez-y ! Les spotteurs vous feront découvrir leur passions et partagerons avec vous leurs connaissances. Vous verrez qu’être spotteur demande une très bonne endurance, une grosse motivation et surtout des connaissances ornithologiques pointues. Et surtout, vous enrichirez votre bagage de connaissances ornithologiques, vitesse grand v !
Tous les ornithologues ne sont pas toujours spotteurs ou bagueurs. Il s’agit de spécialités qui demandent un gros investissement de temps. Un très bon bagueur, malgré ses connaissances techniques, peut ne pas être un excellent spotteur. A l’inverse, un spotteur, malgré ses compétences en identification, peut se révéler moins assuré avec un oiseau en main qu’un très bon aide-bagueur. Il s’agit de deux domaines qui, bien qu’ayant l’oiseau en point commun, demande un savoir-faire très différent.
Et c’est tout pour aujourd’hui ! Vous avez des questions ? Une petite envie de papoter d’oiseaux ? Une idée de sujet, d’une thématique que vous souhaiteriez que j’aborde dans un article ? Retrouvez-moi sur Facebook, Twitter, Instagram, Pinterest et LinkedIn.
Sources et recommandations :
- Sites web : Migraction
- Image à la Une : Michael Nunes